Difficulté à s’endormir, pleurs, peur du noir : l’heure du dodo n’est pas toujours facile à gérer pour les parents d’un tout-petit ! Pour un coucher plus serein, pas de place à l’improvisation : il faut prendre de bonnes habitudes sur le long terme. Marie-Françoise Vecchierini, neuropsychiatre spécialiste du sommeil, nous livre ses conseils.

 

Comment préparer un tout-petit à sa nuit de sommeil ?

M.-F. Vecchierini : Pendant le moment qui précède le coucher, il est important de mettre en place un rituel qui se répète chaque jour et qui rassure le tout-petit : on peut lui raconter une histoire, écouter de la musique ou simplement avoir un moment de partage et de discussion. Chaque famille trouve le rituel qui convient à l’enfant et que celui-ci va associer, par habitude, à l’endormissement. Il est essentiel que les parents prennent du temps pour bien faire ce rituel car un enfant est très sensitif : si ses parents sont pressés ou ont envie de partir, il va le ressentir et cela peut, inconsciemment, causer une rupture dans la relation. La démarche doit être la plus naturelle et la plus paisible possible. Juste avant le coucher, il faut donc éviter tout ce qui peut être violent, comme les disputes ou les colères. La télévision est également décon-seillée en tant que rituel, non seulement à cause de la lumière des écrans qui maintient éveillé, mais aussi à cause du caractère parfois violent (bagarres, jeu excitant) du contenu des émissions, et enfin parce que rien ne remplace la relation aux parents.

Doit-on rester avec bébé quand il s’endort ?

M.-F. V. : Dès que l’enfant en est capable, il est préférable qu’il aille se coucher seul et qu’il grimpe lui-même dans son lit. On peut lui expliquer que le coucher est un moment où l’on est seul, au cours duquel on peut jouer un peu dans son lit avant de s’endormir, développer son imagination et faire des rêves. Cette petite vie personnelle est à présenter comme agréable et apaisante. En se couchant seul, l’enfant va ap-prendre à trouver ses propres méthodes pour s’endormir.

Pourquoi est-ce important ?

M.-F. V. : Jusqu’à 3 ans, il est physiologique de se réveiller au moins deux fois par nuit. Cela ne pose pas de problème si l’enfant sait se rendormir seul. Il faut donc qu’il ait pu développer des méthodes d’endormissement bien à lui. Pour cela, les parents doivent éviter de faire des manœuvres pour aider leur enfant à s’endormir au moment du coucher, comme lui laisser sucer les doigts de sa maman ou faire un tour en voiture. Il est certain que, par la suite, le bébé va réclamer tout le temps les mêmes modalités d’endormissement. Si on lie l’endormissement à un stimulus qui appelle la présence automatique des parents, l’enfant ne saura pas se rendormir seul et pleurera la nuit pour appeler ses parents à chacun de ses éveils.

Comment faire si bébé a du mal à s’endormir seul ?

M.-F. V. : À partir d’environ 12 mois, un tout-petit peut se servir d’un objet transitionnel pour s’endormir plus facilement. Il va transférer son affection sur cet objet qui peut être tout à fait banal : un tissu, une peluche… Cela va lui permettre de surmonter ce moment difficile qu’est la séparation avec ses parents. L’enfant peut aussi avoir du mal à s’endormir à cause de la peur du noir. Dans ce cas, il vaut mieux en parler avec lui en amont pour le rassurer. On peut également mettre une petite lumière douce qui ne perturbera pas son rythme ou laisser la porte de la chambre entrouverte, si cela le réconforte. En cas de problèmes d’endormissement, les parents peuvent également se demander si la chambre de leur tout-petit n’est pas trop bruyante ou trop lumineuse (ce qui gênerait aussi un adulte d’ailleurs) et veiller à ce qu’elle soit bien aérée, à une température de 18 à 20 °C.

L’heure du coucher et des siestes influence-t-elle l’endormissement ?

M.-F. V. : Oui ! Pour assurer un bon sommeil à l’enfant, il est important que son coucher se fasse à des horaires réguliers : cela va l’aider à garder un rythme veille-sommeil stable. La durée et l’heure des siestes dans la journée jouent également un rôle. En effet, des siestes trop longues ou trop tardives peuvent causer des difficultés d’endormissement. De 9 à 12 mois, deux siestes dans la journée suffisent : le matin et en début d’après-midi. À partir de 18 mois, il n’y a plus qu’une sieste en début d’après-midi qui disparaîtra vers 4 ou 5 ans.

Si le coucher reste problématique, y a-t-il des solutions ?

M.-F. V. : Il faut chercher à comprendre d’où vient le problème en prenant en compte les éléments de vie et les particularités propres au bébé. N’oublions pas que tous les enfants n’ont pas le même besoin de sommeil : certains peuvent aller se coucher un peu plus tard que d’autres. La maturation du sommeil s’effectue en majorité au cours des 2 ou 3 premières années : cette maturation est liée à celle des autres fonctions physiologiques mais aussi aux facteurs environnementaux, notamment à l’environnement psychologique et sociologique propre à chaque enfant. Elle peut donc varier selon les enfants. Si l’enfant ne veut pas aller se coucher, pleure ou se lève et se relève dès qu’il est au lit, demandant une nouvelle lecture, réclamant à boire… il faut rechercher avant tout une cause psychologique et la source d’une anxiété qui explique que l’enfant ne peut lâcher le cadre rassurant de ses parents. Dans le noir, l’enfant a moins de contrôle sur ses émotions. Les parents doivent donc, dans un cadre relationnel d’affection, d’attention et de compréhension, faire preuve de fermeté. Sans rien changer au rituel d’endormissement, mettre des limites est aussi une attitude rassurante pour l’enfant. En amont, il est important de parler avec lui du sommeil, de ses bienfaits, du fait que ses parents iront aussi se coucher très vite après lui.

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dr-vecchieriniMarie-Françoise Vecchierini est neuropsychiatre au centre du sommeil de l’Hôtel-Dieu, à Paris. Elle est également membre de la SFRMS (Société française de recherche et médecine du sommeil).

Marie-Françoise Vecchierini nous donne également ses précieux conseils sur le sommeil des tout-petits dans ce document de l’Institut National du Sommeil et de la Vigilance : actu-carnet-sommeil-0-3-ans


Dossier réalisé par : Elise Rengot

Illustration : © Laurent Simon