Quels sont les différents stades du dessin chez l’enfant ?
Chez tous les enfants, le dessin évolue en suivant les mêmes étapes. Il nous donne à voir comme un film de leur maturation et nous permet d’observer leur développement. Ainsi, autour de 12 mois, les premiers tracés de bébé accompagnent ses premiers pas et ses premiers mots. Puis, les gribouillis en balayages (1) et les gribouillis arrondis (2) apparaissent au cours de la deuxième année, et sont associés aux comportements d’exploration et d’affirmation de soi. À 3 ans, les ronds se ferment : l’enfant dit « je » et se représente comme un tout. Le rond est la première forme d’identité : le fermer, c’est séparer le dedans (soi) du dehors (le mode extérieur). Il ne lui manque plus qu’à rajouter deux points dans le rond pour donner naissance au bonhomme têtard, autour de 3 ans et demi (3). Une année entière est ensuite nécessaire pour donner un ventre au bonhomme, vers 4 ans et demi (4). Puis, entre 5 et 6 ans, le bonhomme acquiert un schéma corporel complet et genré : si, à 4 ans et demi, on ne sait différencier, dans un couple, le père de la mère, à 6 ans, les stéréotypes de genre sont monnaie courante. La femme a souvent des cheveux longs, une robe et des talons, quand l’homme porte un pantalon, un chapeau et, parfois même, une arme (5 et 6) ! Enfin, vers 10-12 ans, la plupart des préadolescents se désintéressent du dessin, considérant qu’il s’agit d’une activité pour les petits. Si les enfants continuent de dessiner à cet âge, cela signifie souvent que le dessin fera partie intégrante de leur vie, même lorsqu’ils seront adultes.
De gauche à droite : 1. gribouillis traits (par Alistair), 2. gribouillis en rond, 3. bonhomme têtard (par Alistair), 4. bonhomme avec un ventre (par Hugo), 4. homme (par Soline), 5. femme danseuse.
Devons-nous encourager les enfants à dessiner ?
Bien sûr, mais il est important de ne pas trop solliciter les tout-petits, et de les laisser aussi souvent que possible prendre l’initiative de leurs activités. Pour les inviter à dessiner, il suffit donc de mettre à leur disposition dans un coin de la maison une table et une chaise à leur hauteur, avec des feuilles, des feutres ou des crayons de couleur. De cette façon, ils pourront s’exprimer librement et à tout moment sur la feuille blanche. Mais, si vous demandez à votre enfant de dessiner quelque chose de particulier à un moment précis de la journée, que vous lui donnez un coloriage ou lui montrez un modèle à copier, vous le privez d’une occasion de s’affirmer et de se construire, en dessinant le monde tel qu’il le perçoit. Et, s’il réclame que vous dessiniez un escargot ou une voiture à sa place, déclinez sa demande et encouragez-le plutôt à le faire : « Tu vas y arriver, montre-moi ! » En restant à côté de lui, votre attention va l’aider à dessiner ce qu’il a en tête et à aller au bout de son projet. Enfin, s’il vous montre son dessin ou vous l’offre et que vous le trouvez beau, n’hésitez pas à le lui dire : émerveillez-vous !
Quel matériel mettre à sa disposition ?
Il n’est ni utile ni souhaitable que vous donniez à votre enfant des dizaines de feutres, craies grasses ou crayons. Vous ne stimulerez pas plus sa créativité avec une telle débauche de matériel et disperserez, au contraire, son attention. Privilégiez plutôt une seule pochette, idéalement de crayons de couleur. Ils sont effectivement plus intéressants que les feutres, puisque la résistance de la mine du crayon sur le papier freine le geste de l’enfant, augmente la précision de son tracé et lui demande une certaine force musculaire utile au développement de sa motricité fine. Toutefois, assurez-vous de choisir les bons crayons selon l’âge de votre petit. Plus il est jeune, plus ils doivent être courts et de gros diamètre, pour une meilleure prise de l’objet.
Quels sont les bénéfices du dessin ?
Le dessin a de nombreux bienfaits. C’est tout d’abord un plaisir : l’enfant y trouve une certaine liberté qui lui permet de développer son imagination et sa créativité. C’est aussi un moyen d’exercer sa motricité fine : tenir un crayon et le diriger sur la feuille le prépare notamment à l’écriture. Enfin, dessiner le connecte à lui-même et lui permet de comprendre ses émotions, ce qui lui arrive au quotidien. Il n’est pas rare, par exemple, que les enfants dessinent lorsque les parents se séparent, ou qu’un petit frère ou une petite sœur voit le jour !
Le dessin nous donne donc des informations sur ce que traversent nos enfants ?
Tout à fait. Au-delà des indications qu’il nous donne sur son développement, le dessin est un langage, une fenêtre sur le monde intérieur de l’enfant et sur la façon dont il perçoit ce qui l’entoure. Ce qu’il représente, la taille des éléments sur la feuille, la pression exercée sur la mine du crayon ou les couleurs utilisées peuvent avoir leur importance et raconter bien des choses. Mais, attention, l’interprétation d’un dessin reste du domaine du spécialiste (psychologue, pédopsychiatre ou pédiatre). Ce n’est pas parce que votre enfant dessine avec du noir et du rouge qu’il est forcément triste ou en colère. Et ce n’est pas non plus parce qu’il dessine en tout petit sur le coin d’une feuille qu’il est forcément timide ! Si un dessin vous interroge, ne cherchez donc pas à le déchiffrer seul. Vous pouvez bien évidemment poser des questions ouvertes à votre enfant : « Et là, qu’as-tu dessiné ? » ou bien « Pourquoi elle pleure, la petite fille ? ». Mais, s’il ne vous répond pas, nul besoin d’insister, car le dessin est intime et un tout-petit peut ne pas avoir envie de vous dire ce qu’il a représenté. Néanmoins, vous pouvez montrer le dessin à son médecin à l’occasion de la prochaine consultation, après en avoir informé votre enfant, et obtenu son accord.
Pour en savoir plus, retrouvez : Ce que nous racontent les dessins d’enfants. Des réponses aux parents, Dr Anne Lorin, éditions Philippe Duval.
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Dossier réalisé par Marie Greco.