Alerte rouge ! Au beau milieu du supermarché, vous venez de dire « non » à bébé. Votre petit se met alors à hurler, à taper des pieds… voire à se rouler par terre ! C’est LA grosse colère. Impossible de le calmer. Tout comme Ferdinon le petit mouton, bébé a beaucoup de mal à gérer cette émotion qui le dépasse. Alors, quelle attitude adopter ? Comment accueillir au mieux la colère de son enfant tout en respectant ses propres limites de parent ? C’est ce que Sophie Aucourt, formatrice en communication bienveillante, nous explique ce mois-ci dans Picoti.
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Pour quelles raisons un bébé se met-il en colère ?
Sophie Aucourt : Tout simplement pour atteindre la satisfaction d’un besoin qu’il ne peut exprimer en mots. Le tout-petit peut se fâcher s’il a faim, soif, chaud, froid, s’il veut un câlin ou s’il refuse d’être seul par exemple. C’est un moyen pour lui de dire que la situation ou le comportement de l’autre ne lui convient pas !
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Pourquoi se laisse-t-il souvent déborder par sa colère ?
S. A. : Un enfant n’est pas capable de gérer ses émotions car son cerveau n’est pas encore adapté pour cela. Le cortex (partie du cerveau permettant de relativiser, d’imaginer ce que ressent l’autre, de peser le pour et le contre, etc.) se construit lentement. Pour que son développement soit complet, il faut attendre que le bébé ait… 25 ans ! Impossible, donc, pour un jeune enfant de canaliser sa colère : il ne peut que la vivre pleinement, avec des larmes et des cris, à moins que son besoin ne soit satisfait.
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Comment réagir face la colère d’un tout-petit ?
S. A. : Même en colère, le bébé a besoin de présence et d’accompagnement. La psychologue suisse-américaine Aletha Solter dit d’ailleurs : « C’est lorsqu’ils semblent en mériter le moins que les enfants ont le plus besoin d’amour et d’attention. » Je conseille donc, avant tout, d’écouter l’enfant et d’accueillir sa colère. Ce n’est pas toujours facile : parfois, les parents n’en peuvent plus, et c’est normal ! Ils peuvent alors s’isoler un peu et prendre quelques minutes pour eux… Ils vont ainsi pouvoir se calmer et, ensuite, accorder à l’enfant une écoute plus posée. Le tout-petit pourra alors exprimer ses émotions, ce qui le déchargera d’un poids. Si on ne lui offre pas cette possibilité, il risque d’emmagasiner ses colères jusqu’au moment où, telle une Cocotte-Minute, il va exploser et être tout le temps fâché.
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En quoi la communication bienveillante peut-elle aider les parents à gérer les colères des petits ?
S. A : La communication bienveillante privilégie la relation à toute notion de pouvoir. Dans la famille, cela veut dire que les parents évitent les punitions, les menaces et les récompenses comme outils pour éduquer l’enfant et qu’ils cherchent à entendre les besoins de chacun. Cela leur permet d’acquérir une autorité naturelle et authentique, exprimée dans le calme et le respect. Au quotidien, la communication bienveillante implique d’établir ensemble les règles et de gérer les conflits de la famille en écoutant ses membres, afin que chacun se sente responsable. L’enfant peut donc exprimer son désaccord même si, bien sûr, les parents se positionnent fermement sur les sujets qui leur semblent importants. Si l’enfant se fâche, je déconseille de le faire taire en le punissant dans sa chambre par exemple, car le message qu’on lui fait passer à ce moment-là est : « Tu dois te débrouiller seul ! » Cela peut causer des blessures d’abandon. Écouter l’enfant en colère, même sans lui céder, c’est lui montrer qu’il peut compter sur ses parents (ou d’autres figures d’attachement) et qu’il est complètement accepté pour ce qu’il est.
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Comment se faire obéir, sans punitions ni menaces ?
S. A. : Pour se faire obéir, les parents doivent avoir une « boîte à outils » bien garnie, car une solution peut fonctionner un jour et pas l’autre. Je ne peux que leur donner des pistes : privilégier la coopération, proposer des choix à l’enfant, faire appel à son imaginaire, bien adapter l’environnement à ce qu’on lui demande de faire, attirer son attention sur ce qui est permis, mettre en valeur ce qu’il a fait de positif dans la journée… Dans tous les cas, les parents ne peuvent pas éviter qu’il y ait parfois des crises : il faut les accueillir comme elles viennent. Certes, parfois, ce n’est pas le bon moment (fatigue, regard des autres…). Les parents trouvent alors souvent des stratégies, comme détourner l’attention de l’enfant ou accéder à sa demande pour éviter la crise. Dans l’idéal, il faudrait être capable de rester ferme sur ses positions, tout en accordant une oreille attentive à la frustration de l’enfant. Pas toujours simple !
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Après 20 ans d’expérience dans le secteur de la communication d’entreprise, Sophie Aucourt est devenue formatrice en communication bienveillante. Elle anime actuellement des ateliers interactifs pour parents et enseignants, en tant que membre de l’association Entendons-nous.
Depuis sa création, en 2012, cette association promeut, partout en France, la communication bienveillante et non-violente au sein de toute relation (en famille, à l’école et au travail). Elle propose, entre autres, des ateliers de formation aux méthodes « Gordon » (méthode de communication avec ses enfants et avec l’autre parent, reposant sur l’écoute, l’expression de ses besoins et, pour les plus grands, la résolution des conflits sans perdant) et « Faber et Mazlish » (approche de la communication en famille basée, elle aussi, sur l’écoute ainsi que sur l’empathie, le respect des émotions de l’autre et la gratification).
Plus d’infos sur le site : www.entendons-nous.fr
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Dossier réalisé par Elise Rengot.
Illustration : © Clothilde Delacroix.