Écarquillés, plissés, attendris, surpris, rêveurs, rieurs, boudeurs… Si vous y prêtez attention, vous verrez que votre tout-petit s’exprime beaucoup avec son regard. Tout ce qu’il ne peut pas encore dire avec des mots, il le dit avec ses yeux. Raison de plus pour y être attentif et en prendre soin. Notre dossier ce mois-ci vous dit tout sur le fonctionnement, le développement, les examens concernant les jolis yeux de votre tout-petit…
1. Pourquoi voir est si important ?
La vue conditionne le bon développement d’un enfant, c’est-à-dire son éveil cognitif, moteur, mais aussi langagier et affectif. Coordonner ses mouvements, reconnaître des personnes et des objets, entrer en relation avec autrui et se faire comprendre : toutes ces spécificités humaines passent, entre autres, par la vue. Or, c’est l’un des derniers sens à s’aiguiser. Dans l’obscurité du ventre maternel, en effet, les bébés ne peuvent pas stimuler leurs yeux, qui poursuivent leur développement après la naissance. C’est pour cette raison que les médecins suivent de près la vue des prématurés, particulièrement fragile.
2. Que voit mon enfant ?
À la naissance, un nourrisson ne voit que ce qui est très proche. Puis, les couleurs, la perspective s’affinent. Entre 2 et 9 mois, votre tout-petit discerne les expressions du visage. Il s’amuse à reproduire les sourires, puis les grimaces. À 1 an, l’acuité visuelle, c’est-à-dire la capacité de l’œil à distinguer des détails de loin, n’est encore qu’à 4/10. À 18 mois, votre enfant est capable de montrer des objets du doigt sans avoir à se rapprocher, par exemple. Ce n’est que vers 5 ans que l’œil humain peut atteindre 10/10. Pour repérer d’éventuels troubles, il est donc important de connaître les étapes de ce développement, qui se poursuit encore jusqu’à 10 ans !
3. Quels sont les différents contrôles ?
Il existe trois contrôles recommandés chez le médecin, notifiés dans le carnet de santé : dans la première semaine de vie (le plus souvent, cet examen est réalisé à la maternité), à 9 mois et à 2 ans. Cependant, dès le premier mois et en cas d’antécédents familiaux, votre médecin peut prescrire un bilan orthoptique, appelé bébé-vision. À partir de 2-3 ans, il peut également conseiller de consulter un ophtalmologiste pédiatrique. N’attendez pas que votre enfant, même grand et sachant parler, se plaigne de mal voir : il n’a pas de moyens de comparaison !
Attention, écrans !
La lumière bleue fait partie du spectre de la lumière visible : elle est présente dans la nature, car le soleil en émet. La lumière « bleue » provenant des écrans est nocive pour les enfants, dont le développement visuel est en pleine évolution. Des études ont montré que l’utilisation prolongée d’appareils numériques provoque des troubles du sommeil, mais aussi de la vue. Rappelons que l’Association française de pédiatrie ambulatoire conseille de ne proposer aucun écran aux enfants de moins de 3 ans, télévision comprise.
4. Comment se déroulent ces examens ?
Le médecin procède à un examen externe des yeux, vérifie leur mobilité, leur réaction à la lumière. Il regarde si l’enfant est capable de fixer un objet et de le suivre des yeux. Il s’agit d’examens ludiques, à l’aide d’images et de peluches à pointer du doigt et à saisir, pendant lesquels votre enfant reste sur vos genoux. Le test bébé-vision précise les anomalies, comme des différences de vue entre les yeux (pour vérifier qu’un œil ne travaille pas plus que l’autre). Chez un ophtalmologiste, des gouttes peuvent être instillées dans les yeux de votre enfant pour dilater la pupille et procéder ainsi à des examens plus précis.
5. Quels sont les principaux troubles visuels ?
En France, environ 10 % des enfants de moins de 5 ans pourraient présenter des anomalies de la vision. Le port de lunettes correctrices est alors prescrit.
- L’amblyopie est la diminution de l’acuité visuelle d’un œil, qu’on ne peut alors plus corriger. Pour éviter cette asymétrie de vision, le port d’un cache sur l’œil qui travaille trop est parfois nécessaire.
- Un enfant astigmate voit mal de loin comme de près.
- L’enfant myope, lui, voit mal de loin.
- L’hypermétrope, à l’inverse, voit mal de près.
- Il existe aussi des maladies de l’œil et des paupières comme la conjonctivite, un larmoiement anormal ou des orgelets : il est alors nécessaire de consulter son médecin.
6. Qu’est-ce que le strabisme ?
Cette perte du parallélisme des yeux touche un quart des enfants de 0 à 6 ans. Cette anomalie n’est pas qu’esthétique : elle peut altérer la vision de manière définitive. Souvent, le strabisme s’accompagne d’une baisse de la vision de l’œil qui dévie. Des séances de rééducation chez un orthoptiste peuvent être nécessaires. Une intervention chirurgicale sur les muscles des yeux peut également être proposée.
7. Quels signes doivent alerter ?
Un bébé sensible à la lumière, se frottant et clignant fréquemment les yeux, plissant le front, larmoyant plus que de coutume… autant d’indices de gêne visuelle. Il ne suit pas bien du regard ou tourne la tête pour utiliser toujours le même œil ? Ce n’est pas normal et il vaut mieux consulter. Une fois la marche bien acquise, un enfant qui voit mal continue de se cogner fréquemment. Une tendance à loucher peut être un début de strabisme. Enfin, l’apparition d’une blancheur sur la pupille doit être montrée en urgence à un médecin.
8. Au secours, mon bébé doit porter des lunettes !
Pas de panique ! Aujourd’hui, les montures sont adaptées à leur taille, en plastique, très légères. Les branches sont ultra souples pour éviter la casse. Pour les tout-petits, elles peuvent même avoir un lien qui passe derrière la tête pour ne pas les perdre lors de leurs activités dynamiques. Choisissez une monture assez haute afin d’éviter que l’enfant regarde par-dessus. L’Assurance-maladie propose maintenant un panier 100 % santé dans une limite de prix, pour les verres et les montures. Les opticiens proposent souvent, pour les lunettes enfants, des garanties casse et rayures.
Sources : INSERM, Snof, Asnav, ministère de la Santé, AFPA.
1, 2, 3… soleil
Plus qu’un accessoire de mode, il est nécessaire d’équiper votre tout-petit de lunettes de soleil contre les UV. Demandez conseil à un opticien pour des lunettes de bonne qualité, avec un indice de filtration élevé (catégorie 3 ou 4) et répondant aux normes CE.
Merci à la pédiatre Anne Mahé-Guibert et à Monique Soury, orthoptiste et opticienne pour leur relecture attentive.
Dossier réalisé par Isabelle Pouyllau.
Illustration : Clothilde Delacroix. Photos : Abode Stock.