Il permet un suivi rigoureux de la santé de l’enfant et sert de support au dialogue régulier entre les parents et les médecins. Le carnet de santé, réactualisé l’année dernière, fait partie du quotidien des familles… mais depuis quand ? Toupie vous propose un petit tour dans sa machine à voyager dans le temps !
Les origines du carnet de santé remontent au 19e siècle, à une époque où la mortalité infantile touche encore plus d’un nouveau-né sur six ! Pour lutter contre ce fléau, de nombreux médecins cherchent à offrir aux petits un suivi plus efficace et ils estiment que cela ne peut passer que par une meilleure coordination des soins et une meilleure transmission des informations entre eux et les familles. C’est dans ce contexte que certains d’entre eux créent les premiers « livrets de santé », qui se confondent parfois avec des albums de naissance (car, en plus des données médicales, les parents peuvent y noter les premiers sourires, les premiers pas, les premiers mots…).
Le « livret maternel », ancêtre du carnet de santé
Jean-Baptiste Fonssagrives, un médecin montpelliérain, est le premier à imaginer un livret pour aider les mères de famille à observer l’état de santé de leur enfant au quotidien, pour ensuite pouvoir « seconder » le médecin lors des consultations. Cet ancêtre du carnet de santé, intitulé Livret maternel pour prendre des notes sur la santé des enfants, paraît en 1869. Il existe en deux versions, qui reflètent les stéréotypes dominants de l’époque : celle pour les filles consacre six pages à la puberté, alors que celle des garçons se concentre davantage sur les aptitudes sportives et intellectuelles. Avec un système de tableaux et de cases à remplir, ce livret invite les parents à noter toutes les informations concernant la santé de l’enfant : hérédité, naissance, allaitement, évolution de la taille et du poids, vaccins, dentition, marche, maladies, accidents, opérations, etc. Chaque famille est libre de l’acheter ou non. En cinq ans, environ 1 200 exemplaires sont vendus en France.
Des conseils… et des pubs !
À partir des années 1880, l’idée fait des émules. Des pharmaciens éditent à leur tour leurs propres livrets, tout comme des firmes telles que Nestlé ou Gallia. Non seulement ces documents permettent le suivi médical de l’enfant, mais ils délivrent également des conseils destinés aux parents, sur l’hygiène et l’alimentation. Ces pages éducatives sont toutefois mélangées avec des publicités pour des sirops de dentition, des pilules purgatives, des pèse-bébés, des assurances et même du chocolat !
Citation choisie…
« Nourrices sur lieu – On les trouve dans les bureaux de placement de nourrices ; ces femmes viennent généralement de la campagne avec leurs enfants. La choisir âgée de 25 à 35 ans, ayant un lait de 3 mois, pour un nouveau-né, et prendre de préférence une multipare habituée à soigner les enfants. Brune, bien portante, ayant de bonnes glandes mammaires et de bonnes dents, telles sont les conditions essentielles que doit remplir une bonne nourrice. Le médecin, après l’avoir auscultée, fera un examen sérieux. »
– Extrait du carnet de santé du docteur René Vaucaire, 1898 –
Un carnet de plus en plus éducatif…
Sous l’impulsion de l’écrivaine Louise Hervieu, un carnet de santé officiel et gratuit est finalement généralisé par le ministère de la Santé publique en 1939, et il devient obligatoire dès 1945. Rempli essentiellement par les médecins, il se veut un instrument de suivi, de dépistage mais aussi de prévention à l’égard des parents. Il comporte, par exemple, des informations sur l’alcoolisme et la tuberculose, ainsi que des conseils pour la stérilisation du lait. Cette version reste en usage jusqu’aux années 1960, avant de subir de multiples transformations : disparition, puis réapparition et mise à jour des courbes de croissance, instauration de certificats de santé obligatoires, etc. Peu à peu, le carnet de santé s’affirme comme un outil d’éducation des parents. En 1974, des pages « Conseils » sont ajoutées concernant l’environnement de l’enfant : logement, eau courante, voiture, etc. Puis, dans les années 1990 et 2000, les encarts se multiplient, avec des conseils sur le rythme de vie, l’alimentation, le sommeil, la santé bucco-dentaire, ou encore des mises en garde contre les accidents domestiques, les dangers du tabac, du soleil, des animaux, des portes…
… et de plus en plus accessible !
En parallèle à cette évolution du contenu, le carnet de santé devient également de moins en moins austère, afin d’inciter les parents à se l’approprier et à participer davantage à son remplissage. Les premières pages en couleurs apparaissent en 1985, pour distinguer plus facilement les différentes parties du carnet. En 2006, de nouveaux onglets permettent un accès plus rapide aux rubriques. Des illustrations et des pictogrammes améliorent la lisibilité de l’ensemble.
Quoi de neuf, docteur ?
En 2018, les carnets de santé ont été mis à jour sur la base des recommandations du Haut Conseil de la santé publique. Entrés en vigueur le 1er avril dernier, ils proposent de nouvelles courbes de croissance, revues à la hausse pour qu’elles soient plus en accord avec les gabarits des enfants d’aujourd’hui. Par ailleurs, ces nouveaux carnets accompagnent l’évolution des obligations concernant les vaccins. En effet, pour les nourrissons nés à partir du 1er janvier 2018, huit vaccins, déjà largement recommandés, sont devenus obligatoires (coqueluche, rougeole, oreillons, rubéole, hépatite B, bactérie Haemophilus influenzae, pneumocoque, méningocoque C). Ils viennent compléter les trois qui l’étaient déjà (diphtérie, tétanos, poliomyélite).
Encore plus de prévention !
Autre changement à souligner : les messages de prévention ont été enrichis et actualisés. Par exemple, des recommandations ont été ajoutées pour limiter les risques liés à la présence d’allergènes et de produits chimiques dans l’environnement de l’enfant (aérer le domicile, ne pas utiliser de parfums d’intérieur, utiliser des jouets et des articles de puériculture homologués CE ou NF et des biberons garantis sans bisphénol A, etc.). Un avertissement clair met aussi en garde contre le syndrome du bébé secoué. De plus, pour réduire les risques de mort subite du nourrisson, le nouveau carnet de santé conseille d’utiliser un lit à barreaux sans tour de lit et de faire dormir le bébé dans la chambre des parents pendant les six premiers mois. D’autres conseils concernent les habitudes de vie comme, par exemple, d’éviter de mettre un enfant de moins de 3 ans dans une pièce où la télévision est allumée. Un nouveau carnet de santé qui prend donc aussi bien en compte la santé physique que l’éveil psychologique des petits !