Peluche, cube, dînette, voiture ? La liste des jouets est infinie et ne comptez pas sur bébé pour vous aider à faire le tri. Par contre vous pouvez compter sur Picoti ! Notre journaliste est partie à la rencontre de ludothécaires, vrais spécialistes de la question, pour vous proposer un petit guide d’achat…
À Noël comment réunir intérêt psychomoteur du jeu et plaisir du nouveau jouet, sans tomber dans une consommation excessive, ni y passer un temps fou ? En suivant les conseils de ludothécaires, qui observent tous les jours nos enfants dans leur activité favorite ! Alban Anatole et Dario Cavalié animent une ludothèque, à Toulouse. Ces lieux ouverts à tous mènent des animations autour du jeu (conseils, prêts, etc.) tout au long de l’année.
Quel jouet à quel âge ?
À cette question, la réponse est claire. « L’important est qu’un jouet soit adapté aux capacités de jeu d’un enfant, pour qu’il ne soit pas mis en échec. Les indications d’âge sur les emballages sont plutôt un argument marketing… », explique Alban Anatole. Par « capacités de jeu », il faut entendre les compétences psychologiques nécessaires pour appréhender un nouveau jeu : sensorielles, de manipulation, d’imagination, d’assemblage, etc. Ces stades de développement sont communs à tous les enfants, mais leur acquisition varie dans le temps : « Prenez l’image d’un escalier : tous les enfants vont le monter, mais pas à la même vitesse », explique le ludothécaire.
Manipuler et déduire
Hochets, peluches, bâtons de pluie, jouets à bascule pour les plus petits, puis jouets à tirer, boîtes à formes et, pour les plus grands, kaléidoscopes, cerceaux… Ces jeux dits d’exercice* favorisent l’expérimentation sensorielle et motrice. Il existe aussi des xylophones, des jeux de cloches et de percussions, qui permettent de découvrir les sons. « Sonores, mais pas bruyants », conseille Alban Anatole. Et quid des matières, du toucher ? « Les adultes ont tendance à vouloir des jouets en bois… », souligne judicieusement Alban Anatole. Or, certains jouets en plastique, comme les pop-up, fonctionnent aussi très bien. Ces jeux d’exercice invitent également à découvrir la notion de cause à effet, très constructive : si je touche, si je renverse, si j’actionne tel bouton, il se passe quelque chose. Les jeux de balles à taper, les rampes de voitures en sont le meilleur exemple.
« C’est pour les bébés ! »
Tous ces premiers jouets d’exercice « durent » au-delà de la première année. Quand on les observe, les enfants y reviennent toujours, avec nostalgie et plaisir. « C’est aussi pour cette raison qu’on se refuse de parler d’âge en ludothèque. On ne va jamais dire, par exemple « c’est un jeu de bébé, tu es trop grand ». Il faut laisser la possibilité aux enfants de régresser dans le jeu, sans jugement. »
Jouer à faire semblant
Jouer à la dînette, à la poupée, aux pirates ou aux pompiers doit être accessible à tous les enfants, sans distinction de genre et sans jugement. « Les parents doivent garder à l’esprit que les enfants jouent alors un rôle, dans un cadre bien défini. Ils reviennent à leur réalité après », explique Alban Anatole. Ces jeux de symbolique où l’on « fait semblant », où l’on « fait comme si » favorisent ainsi l’imagination des enfants, autour de 2 ans et demi-3 ans. À partir de leur vécu, ils élaborent tout un tas de scénarios, à l’aide de déguisements, d’objets du quotidien à leur taille, etc. « Dans ces moments- là, l’enfant va proposer ses propres règles. Par exemple, il est très intéressant, pour lui, d’inverser les rôles : je suis le papa, tu es l’enfant.»
LA FIN DU « FAIRE COMME MAMAN » ?
Fabricants de jouets, distributeurs et annonceurs ont signé, fin septembre, la deuxième édition de la Charte pour une représentation mixte des jouets, initiée par le gouvernement. Ils s’engagent, notamment, à concevoir des jouets ne véhiculant pas de stéréotypes genrés, à limiter les codes couleur et la catégorisation entre jouets fille et jouets garçon, mais aussi à former leurs vendeuses et vendeurs sur le sujet. Car, en 2020, le marketing genré des marques est toujours visible, même s’il se fait de plus en plus épingler par les consommateurs…
Un train peut faire « pouet pouet »
Quand l’enfant est en mesure de s’intéresser au monde autour de lui, il va commencer à aller vers les jeux de figurines et de mise en scène, comme les circuits de train. « Préférez les circuits sans pile, avec des véhicules s’actionnant à la main et où l’enfant va pouvoir faire les bruits qu’il veut, qu’il invente », conseillent les ludothécaires. Pour eux, les célèbres figurines à la coupe au bol restent le meilleur jeu de mise en scène, car elles proposent une palette sans fin de situations de vie et de thématiques.
Assembler et imaginer
Cubes gigognes, morceaux de bois à empiler, mais aussi puzzles à encastrement : le choix des jouets d’assemblage est également large et astucieux. « Ces jeux favorisent l’acquisition de la spatialisation. Et ils permettent l’apprentissage de la gravité, des forces, de la physique », explique Dario Cavalié. En revanche, aucun intérêt à offrir les fameuses grosses briques multicolores à un enfant de moins de 2 ans. Il les manipulera, certes, mais s’en lassera vite, car il n’a pas encore les compétences cognitives pour créer un scénario. Cela viendra plus tard.
La bonne distance
Pour Dario Cavalié et Alban Anatole, « les parents doivent s’autoriser à tester un jouet avant un achat. Même un simple hochet. Et penser à observer la chambre de leur enfant : de quoi est-elle déjà pleine ? Comment lui apporter de la diversité ? Laissons tomber nos envies et projections d’adultes. Aujourd’hui, sous prétexte de stimuler les enfants, puis de les rendre autonomes, on a tendance à aller trop vite, même dans le choix des jouets, plus vite que leur développement ne le leur permet… »
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Alors, quel que soit le choix du cadeau de Noël, rappelons-nous que le jeu est le domaine de liberté des enfants. À partir du moment où leurs jouets suivent les normes de sécurité et sont bien adaptés à leur développement, ils peuvent expérimenter, répéter, imaginer, faire semblant… sans fin !
Texte : Isabelle Pouyllau. Illustration : Clothilde Delacroix. Photo : © Adobe Stock.
*Cette nomination vient de la classification ESAR, pour Exercice, Symbolique, Assemblage, Règle. Utilisée en ludothèque, elle identifie quatre familles de jeux, correspondant à quatre grands stades de développement de l’enfant.
Merci à l’ensemble du personnel de la ludothèque Patte-d’oie, à Toulouse, pour leur accueil et à l’Association des ludothèques françaises.
Pour aller plus loin : ALF (association des ludothèques françaises) : http://www.kananas.com/associationdesludothequesfrancaises/