L’association Sparadrap agit pour améliorer la prise en charge des enfants lors de soins ou d’examens médicaux. Pour ses 25 ans, elle se dote d’un nouveau site web, plus riche et plus accessible : l’occasion, pour Toupie, de rencontrer sa directrice, Françoise Galland, qui souligne l’importance de bien informer les familles, lorsqu’elles rencontrent une « blouse blanche ».

SPARADRAP : un guide pour parents et enfants dans le monde de la santé - Toupie

Quelles sont les actions de Sparadrap ?

Françoise Galland : Notre objectif est d’aider les enfants à avoir moins peur et moins mal à l’hôpital et chez le médecin. Nous informons et accompagnons les familles concernées en leur proposant un site Internet spécialisé et des documents distribués dans les salles d’attente. Nous incitons également les soignants à développer de bonnes pratiques en pédiatrie : par exemple, nous les sensibilisons à l’utilisation du MEOPA (un « gaz hilarant » qui diminue la douleur et l’anxiété) et nous les encourageons à accepter la présence des parents lors des soins et en salle de réveil. Nous proposons d’ailleurs à ces professionnels des formations, afin de les guider vers une meilleure prise en charge des enfants dans leurs services.

 

En octobre, Sparadrap lance une campagne sur les effets « désirables » de l’information des enfants avant un soin. Quels sont-ils ?

F.G. : Un enfant préfère toujours être informé sur les soins qu’il va recevoir, plutôt qu’être pris au dépourvu. Les mensonges ou omissions, même s’ils paraissent rassurants sur le moment, peuvent susciter chez lui des croyances encore plus angoissantes que la réalité, ou renforcer des fantasmes de culpabilité. À l’inverse, des explications claires, honnêtes et adaptées à son âge lui permettent de bien se préparer, d’avoir confiance dans le personnel soignant et de ne pas se sentir trahi au moment du soin. Si l’enfant est surpris, il risque d’être envahi par un sentiment de panique alors que, s’il comprend le sens des efforts qu’on lui demande, il se sentira plus rassuré. Et cela a des conséquences sur la douleur ressentie, car celle-ci comporte une part émotionnelle : lorsqu’on a moins peur, on a moins mal !

 

Comment adaptez-vous ces informations aux jeunes enfants ?

F.G. : Dans nos guides, nous nous adressons directement à l’enfant avec un message simple, complet et précis. Nous décrivons en détail le déroulement des événements, les lieux, les personnes qu’il va rencontrer, ce qu’on va lui demander de faire, ainsi que les sensations et sentiments qu’il pourrait ressentir. Il ne faut pas éluder les moments contraignants ou douloureux, mais les décrire honnêtement, sans dramatiser ni banaliser, et en les équilibrant avec d’autres moments moins désagréables : ainsi, on parle de la séparation mais aussi des retrouvailles avec les parents, des piqûres mais aussi des techniques d’analgésie utilisées, etc. Avant 7 ans, l’enfant ne sait pas bien lire et il n’a pas encore le vocabulaire ni les moyens cognitifs pour que les mots suffisent à sa compréhension. Les illustrations sont donc essentielles pour présenter le matériel médical, à la bonne échelle et dans son contexte d’utilisation. Les jeux et les poupées sont aussi très adaptés pour expliquer à un enfant ce qui va se passer, ainsi que pour déceler des inquiétudes qu’il n’exprime pas toujours avec des mots… et y répondre !

 

À qui conseillez-vous la visite du site de Sparadrap ?

F.G. : Notre site intéresse les enfants malades ou hospitalisés (avec des thèmes comme l’anesthésie, l’opération, les médicaments…), mais aussi tous les autres ! En effet, 100% des enfants rencontrent des « blouses blanches », que ce soit pour des vaccins, une prise de sang ou une consultation chez le dentiste. Je conseille donc la visite du site à toutes les familles et à tous les enfants, en prévention, car il est important que les premiers contacts de l’enfant avec le corps médical se passent bien. Les informations données sont aussi utiles aux parents. Simplifiées, elles leur permettent de se sentir moins démunis face aux soignants et à leur discours souvent complexe. Elles leur donnent les moyens de poser des questions aux médecins et de continuer à jouer un rôle protecteur auprès de leur enfant.

 

Les « bonnes pratiques » que votre association préconise sont-elles appliquées ?

F.G. : Cela dépend du personnel soignant… Les familles peuvent avoir la chance d’entrer dans un service où les enfants sont écoutés et très bien pris en charge, mais ce n’est pas toujours le cas. Le problème ne vient pas d’un manque de volonté, mais les professionnels de santé ne sont pas toujours formés et n’ont pas toujours les moyens de bien accueillir les petits. Si c’est possible localement, je conseille aux familles de se renseigner et de comparer les centres de soin, pour choisir celui qui leur convient le mieux. En France, beaucoup de progrès ont été faits ces dernières décennies. Par exemple, les antalgiques sont de mieux en mieux adaptés aux petits (crème anesthésiante, solution sucrée, MEOPA…) alors que, jusque dans les années 1980, certains enfants étaient opérés sans anesthésie ! Il y a 20 ans, il était impensable que les parents restent auprès de leur enfant au cours de soins douloureux, alors qu’aujourd’hui c’est de plus en plus courant. Toutefois, encore actuellement, seuls 27 % des hôpitaux disent autoriser souvent ou systématiquement les parents à accompagner leur enfant en salle de réveil, bien qu’on sache qu’une telle séparation peut être traumatisante. Sparadrap a donc encore du travail !

 

Plus de 25 ans d’engagement !

Dès 1986, Daniel Annequin et Didier Cohen-Salmon, deux médecins anesthésistes travaillant dans un service pédiatrique ORL, s’engagent pour aider les enfants opérés des amygdales et des végétations. Ils expliquent l’anesthésie et l’opération aux familles, introduisent une réelle prise en charge de la douleur chez l’enfant et favorisent une approche ludique des soins. Françoise Galland s’associe à leurs travaux. En 1993, avec le soutien de la Fondation de France, ils poursuivent leur démarche en créant Sparadrap. L’année suivante, l’association édite son premier guide illustré à destination des enfants, intitulé « Je vais me faire opérer des amygdales ou des végétations ». Depuis, elle multiplie les publications, encourage les professionnels de santé à améliorer l’accueil des enfants et les soutient dans leurs progrès. Sparadrap participe aux avancées en se montrant force de proposition, en organisant des concours, des formations et des campagnes de sensibilisation pour favoriser la bientraitance des enfants soignés ou hospitalisés.

 

François Galland est co-fondatrice et directrice de l’association Sparadrap.