Antonin Louchard est auteur illustrateur de livres jeunesse depuis les années 90. Il a signé plus de 70 albums humoristiques, à destination des tout-petits, pour les faire rire mais aussi, surtout, pour les faire… lire ! Picoti a interviewé ce « militant de la lecture », qui compte bien faire aimer les livres aux enfants, dès le berceau !
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Comment êtes-vous devenu auteur illustrateur de livres jeunesse ?
Au début des années 90, j’étais journaliste à Science et Vie. Je travaillais avec des dessinateurs de presse et ce sont eux qui m’ont fait réaliser qu’on pouvait gagner sa vie en dessinant. J’y ai vu l’opportunité d’exercer une activité professionnelle plus en harmonie avec ce qui me passionne depuis toujours : le dessin et la peinture. J’ai donc commencé à dessiner pour des magazines et des journaux nationaux. J’ai ensuite contacté des éditeurs pour un projet personnel : Tête à classes, un album où la lecture devient un jeu. Au recto des pages, il y a des énigmes et, au verso, les solutions. À l’époque, mes enfants étaient petits et je trouvais amusant de faire un livre pour eux. Il a été publié par Albin Michel en 1993, et je ne savais pas encore que ce serait le premier d’une longue série !
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Quelle est votre source d’inspiration ?
Je m’inspire de la vie réelle, souvent de souvenirs de ma propre enfance ou de celle de mes enfants. Dans Je veux voler par exemple, je parle de l’absence du père. C’est une situation que tous les enfants connaissent (ne serait-ce que quand leur papa est au travail) et que la littérature pour tout-petits aborde pourtant assez peu. Les cagoules qui grattent, dont je parle dans Supercagoule, sont aussi un sujet assez « universel » ! Pour travailler, je me plonge souvent dans une sorte de rêverie. Je gribouille, plus que je ne prends de notes et, parfois, je puise mon inspiration dans mes dessins. Ainsi, pour Bouh !, je savais que je voulais faire un livre sur la peur et jouer sur les codes de ce registre. J’ai dessiné le personnage du petit fantôme, puis je me suis dit qu’avec la bouille qu’il avait, il ne pourrait jamais faire peur. C’est ainsi que l’idée est venue !
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Quelles sont vos techniques d’illustration ?
J’ai une prédilection pour la gouache, mais j’aime varier les techniques. D’ailleurs, dans l’imagier Tout un monde, que j’ai fait avec Katy Couprie, nous utilisons une trentaine de techniques différentes : dessin, peinture, photographie… Depuis quelques années, je travaille aussi beaucoup sur ordinateur. Je fais les traits directement sur ma tablette graphique, puis j’utilise un logiciel pour la couleur.
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En fait, le rire n’est pas le but en soi. J’utilise l’humour comme une clé pour faire entrer les tout-petits dans la lecture. En leur présentant le livre comme un jouet dont on tourne les pages, comme quelque chose qui fait rire, on les familiarise avec ce support. Et s’ils aiment les livres dès leur petite enfance, ils auront le plaisir, une fois adulte, de découvrir les écrits de Flaubert ou de Proust. Je suis un militant de la lecture et, avec mes albums, je fais du prosélytisme !
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De quoi rient les tout-petits ?
Cela dépend des enfants ! Bébés, ils rient surtout du jeu de coucou-caché, avec une marionnette que l’adulte fait disparaître derrière son dos. Vers deux ans, les tout-petits comprennent que la marionnette n’a pas vraiment disparu et ils peuvent alors passer à un humour différent. Ils aiment beaucoup le comique de répétition. Avec les histoires en randonnée par exemple, on est sûr de les amuser ! Comme il ne faut pas qu’ils se perdent en route, je propose des images et des histoires simples, avec des microrebondissements. Mais je n’oublie jamais celui qui raconte l’histoire à l’enfant : j’essaie de rendre le livre drôle pour les petits et pour les grands, même s’ils ne rient pas des mêmes choses. Pour moi, un bon livre est un livre pour tout le monde.
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Avez-vous des projets de nouveaux livres ?
J’ai toujours des projets. Certains mettent 3 mois pour prendre forme, d’autres 10 ans. En ce moment, je prépare un gros « pavé » sur l’enfance. Ce sera un livre pour les bébés, qui mettra en scène à la fois l’enfant qui survit chez l’adulte et la vie d’adulte qui se manifeste déjà chez le tout-petit, par l’intermédiaire des jouets. J’ai déjà réalisé 150 images à la peinture acrylique… mais je ne peux pas en dire plus pour l’instant !
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Antonin Louchard est auteur et illustrateur pour la jeunesse. Il a signé Supercagoule, Mon petit cœur, Bouh !, Le Pire livre pour apprendre le pot (Seuil Jeunesse), Cékicékapeté ?, Ceci est un livre, C’est la p’tite bête… (Thierry Magnier) et beaucoup d’autres albums pour les tout-petits. Il a créé la collection « Aux petits oignons » (Gallimard jeunesse), avec des livres interactifs à taper, à embrasser, à montrer… Il est également directeur de la collection « Tête de lard » (Thierry Magnier), qu’il a choisi de placer sous le signe de l’humour.
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Dossier réalisé par Elise Rengot