Les peurs infantiles sont courantes et tout à fait normales chez l’enfant. Mais quelles sont-elles exactement ? Et comment aider bébé à mieux les gérer ? Réponses avec Lucie Rose, neuropsychologue et docteure en psychologie.
Qu’est-ce que la peur ?
La peur est un sentiment naturel qui nous protège d’un potentiel danger (réel ou imaginaire). Elle est utile et mobilise notre corps afin qu’il soit en mesure de réagir de la meilleure des façons face à une menace (comme fuir, par exemple). Chez l’enfant, il s’agit d’un passage obligatoire, et même nécessaire, sur le plan cognitif.
Quelles sont les principales peurs jusqu’à 3 ans ?
À cet âge-là, les peurs sont inhérentes au développement. Majoritairement, nous retrouvons donc :
- la peur liée à des stimuli sensoriels imprévisibles : il suffit d’un bruit d’aspirateur, d’un orage ou d’une personne inconnue qui apparaît soudain pour que le signal d’alerte de bébé se déclenche ! Le simple fait d’être surpris sur le plan perceptif crée en effet de la peur chez bébé, qui n’a pas encore le recul nécessaire pour comprendre véritablement ce qu’il se passe. Le cerveau se protège de potentiels dangers, car il ne peut imputer de contexte à la situation.
- la peur liée à la permanence de l’objet : les premiers mois de vie, les bébés n’ont pas encore acquis le fait que les objets ou les personnes qui sont hors de leur champ visuel n’ont pas disparu pour toujours. C’est pour cela qu’ils ont de vives réactions lorsqu’ils ne vous voient plus : ils craignent simplement que leurs figures d’attachement ne reviennent jamais !
- la peur liée au noir : elle se développe autour de 3 ans, lorsque l’enfant a des capacités d’imagination. Privé d’un sens, il perd alors ses repères et s’imagine tout et son contraire… C’est à ce moment-là qu’apparaissent les fameux monstres sous le lit. Mais c’est tout à fait normal : nous sommes des mammifères diurnes, donc peu à l’aise la nuit. C’est d’ailleurs pour cette raison que cette peur perdure parfois à l’âge adulte.
Les tout-petits sont-ils en capacité de jouer à se faire peur ?
Il peut être agréable d’éprouver une émotion forte comme la peur. Mais cela n’est possible que si l’enfant a la capacité de contextualiser les choses et de comprendre, par exemple, qu’un livre de monstres ou de loups ne reflète pas la réalité. Jusqu’à 3-4 ans, il est donc préférable d’éviter ce genre de récit. Mais une fois que l’enfant a développé son imagination, vous pouvez très bien lui lire de telles histoires s’il en a envie. Toutefois, adaptez-vous à sa sensibilité, afin de ne pas l’effrayer outre mesure et de créer des angoisses. Gardez en tête qu’il n’y a aucune obligation à se faire peur !
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Des parents à l’enfant ?
Si vous avez des phobies, vous vous montrez anxieux et vos indices comportementaux indiquent un danger. Par mimétisme, l’enfant aussi aura peur en grandissant ! Pour éviter cela, mesurez le plus possible vos réactions (ou consultez un spécialiste si ces phobies sont ingérables !).
Héréditaires ?
D’après une étude, la peur des serpents et des araignées serait innée ! Des scientifiques ont fait l’expérience de projeter des images d’arachnides et de reptiles à des enfants de moins d’un an. Résultat ? Leurs pupilles se dilatent, signifiant un état de stress important. Pourtant, les bébés n’ont pas encore les capacités d’appréhender l’idée que les araignées ou les serpents peuvent être dangereux… Preuve que ces réactions sont comme inscrites dans nos gènes ! En sommes, nous serions prédisposés à avoir peur de ces petites bêtes dès les premiers mois de vie.
(D’après une étude publiée dans la revue Frontiers in Psychology.)
Dossier réalisé par Marie Greco.