3 questions à…

Marie Ruffier-Bourdet*, ergothérapeute spécialisée en pédiatrie et troubles de l’alimentation du bébé et du jeune enfant.

Qu’est-ce que la néophobie alimentaire ?

C’est une période de sélectivité alimentaire. Le bébé, qui a pourtant connu une diversification ordinaire, refuse tout à coup de manger des aliments nouveaux. Son comportement à table change : il s’oppose, refuse de goûter, détourne la tête ou crie… De quoi laisser les parents démunis. Toutefois, il ne s’agit pas d’un trouble, mais d’un stade dans le développement de l’enfant, qui apparaît généralement à partir de ses 18 mois, lorsque son répertoire alimentaire est déjà construit.

Comment favoriser l’acceptabilité d’un aliment ? Y a-t-il des astuces ?

forcez pas un enfant à goûter un aliment, mais proposez-lui plutôt d’interagir avec, de le toucher, de le sentir ou de lui faire un bisou. Pour se familiariser avec un nouveau produit, les assiettes compartimentées sont très efficaces, car bébé le tolérera plus facilement s’il ne touche pas le reste de son plat. On peut aussi montrer l’aliment dans sa forme première et le cuisiner avec l’enfant, ou proposer de toutes petites quantités, comme des miettes à picorer. Mais surtout : jamais de chantage !

Faut-il s’alerter ?

Absolument pas, et il ne faut pas culpabiliser : la néophobie alimentaire touche beaucoup d’enfants à des degrés différents. En revanche, si ces difficultés persistent ou arrivent précocement – lors de l’allaitement ou de la diversification –, il faut rester vigilant, car il peut s’agir d’un véritable trouble qui nécessite un sérieux soutien médical.

* Créatrice du site ergomums.com.

© Unregardphotographie /Adobe Stock.

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Bibi or not bibi ?

Le goût du lait maternel varie en fonction de l’alimentation de la mère, quand celui du lait industriel reste identique. Le nourrisson allaité est donc habitué dès le berceau à des changements olfactifs et gustatifs, et aurait moins de risques de faire face à la néophobie alimentaire.

Tromperie sur la marchandise…

Les fruits et les légumes sont souvent délaissés. Pourquoi ? Parce qu’ils sont de sacrés menteurs ! Leur aspect visuel est inconstant, et ils se transforment dès lors qu’on les cuisine. La courgette, par exemple, dans son aspect premier est verte et dure, mais elle devient blanche quand on la coupe, ou molle quand on la cuit. L’enfant n’a donc pas confiance en ces produits qui se métamorphosent.

Des degrés de néophobie ?
  • Le degré 0 : l’enfant ne passe pas par cette phase difficile.
  • La néophobie « flexible » : réticence à manger, l’enfant est hésitant et explore son assiette.
  • La néophobie « rigide » : rejet total, quasi pathologique des nouveaux aliments.

Dossier réalisé par Marie Greco.