Avoir un bébé avec un budget restreint est un véritable combat. Quotidiennement, les parents précaires doivent renoncer à acheter des produits d’hygiène ou alimentaires. Pour autant, le bien-être de leurs enfants reste au cœur de leurs préoccupations… Entretien avec l’une des quatre fondatrices de l’association MaMaMa, Magali Bragard.

Pourquoi avoir créé cette association ?

Pendant la pandémie du COVID-19, nous nous sommes rendu compte que les familles qui, en temps normal, n’arrivaient déjà pas à boucler les fins de mois se retrouvaient avec d’énormes difficultés financières. Nous avons donc voulu aider, en devenant d’abord bénévoles pour les Hôpitaux de Paris (AP-HP) ou la Croix-Rouge. Là, nous avons constaté les besoins considérables, notamment des mères solos. Il faut dire qu’en France 82 % des familles monoparentales sont des mères isolées, et près de la moitié vivent sous le seuil de pauvreté. C’est face à ce constat que nous avons décidé de créer l’association.

Quelles sont, concrètement, vos actions ?

Nous faisons des colis sur mesure, qui répondent aux besoins matériels et alimentaires des enfants entre 0 et 3 ans. Les mères de famille remplissent un formulaire, dans lequel elles peuvent préciser ce qu’il leur faut, allant de la taille des couches et des vêtements, jusqu’aux préférences alimentaires. Nous distribuons aussi des jouets car les parents précaires n’ont pas les moyens d’en acheter. Pourtant, ils sont aussi vitaux que des petits pots, car c’est par le jeu que les tout-petits renforcent leurs compétences motrices, sociales et émotionnelles. Les mamans viennent ensuite chaque mois dans notre local, pour recevoir leur colis et discuter avec nos volontaires, qui répondent volontiers à leurs questions et leur donnent des conseils. Nous travaillons aussi avec des acteurs du champ social ou de la médecine, qui peuvent demander des colis pour les familles lorsqu’ils détectent des situations de malnutrition. De nombreux professionnels sont, par exemple, alertés lorsque des mères donnent du lait de vache à leur bébé, ou même l’eau de cuisson du riz qu’elles font cuire à plusieurs reprises… Des systèmes D qui peuvent avoir de lourdes conséquences sur la santé des enfants.


Qui sont ces femmes en situation de précarité ?

Il y a beaucoup de profils différents, mais la précarité se transmet souvent de génération en génération, comme un héritage. Les mères pauvres d’aujourd’hui ont, la plupart du temps, eu des enfances difficiles et n’ont plus de contact avec leur famille. Elles se retrouvent donc isolées, sans personne pour leur servir d’exemple ou leur donner des conseils d’éducation. Souvent, elles fuient aussi un foyer violent, et se retrouvent à la rue, incapables de répondre correctement aux besoins de leurs enfants. Récemment, j’ai reçu une femme qui s’est effondrée en voyant son enfant faire du quatre pattes pour la première fois à l’association. Elle ne l’avait jamais constaté avant car, ayant fui son conjoint, elle s’était retrouvée dans un logement grouillant de cafards et n’osait pas poser son bébé au sol. Ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres, mais ce type d’histoires est malheureusement courant…

Toutefois, il est important de garder à l’esprit que la pauvreté peut toucher n’importe qui, du jour au lendemain. Et le simple fait d’avoir un enfant est un accélérateur de précarité. Il peut suffire d’avoir peu d’économies et de donner naissance à des jumeaux, ou à un enfant porteur d’un handicap qui demande de ne plus travailler pour s’occuper de lui. Les problèmes financiers peuvent frapper à la porte de n’importe qui.

Ce ne doit pas être évident d’entendre ces récits de vie…

Non, en effet. Mais le plus difficile à accepter, c’est que nous n’avons pas les moyens humains et financiers de satisfaire tout le monde et des milliers de demandes restent en suspens. Il est assez terrible de se rendre compte du nombre de parents précaires qui ont besoin de nous et de voir à quel point notre association a du succès… car c’est un bien triste succès.

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Soutenir MaMaMa

N’hésitez pas à devenir bénévole, même le temps d’une journée ou à faire des dons financiers (ne serait-ce que 2 euros), ou des dons matériels, tels que des couches, des biberons et des vêtements, notamment des sous-vêtements, dont l’association manque cruellement ! Rdv sur : asso-mamama.fr

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Dossier réalisé par Marie Greco.